Le gouvernement a défini les 55 pôles de compétitivité bénéficiant d'une impulsion politique pour leur développement et d'aides financières pour l'installation d'entreprises. Ils devraient favoriser l'innovation industrielle sur un territoire donné et dans un secteur précis.
14 octobre dernier, le premier Comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires, le CIACT successeur du CIADT. En remplaçant le terme « développement »par celui de « compétitivité », le Premier ministre ne veut pas se limiter à une nuance sémantique ; il entend donner une nouvelle impulsion à la stratégie industrielle de l'Etat. Dominique de Villepin a annoncé la création de deux nouvelles structures : le Pôle interministériel d'anticipation et de prospective (PIAP), animé par le ministère de l'Economie et celui de l'Emploi, et son bras armé, la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT). « En élargissant les missions du CIADT, le gouvernement affirme une exigence : l'unification des stratégies industrielles et d'aménagement du territoire pour renforcer la compétitivité et la cohésion de notre pays. L'installation du CIACT matérialise l'engagement pris devant les Français de mieux anticiper et accompagner les mutations économiques », a expliqué le Premier ministre. 55 pôles : peu de sélection Lors du CIACT, le gouvernement a validé, dans leur principe, la création de 55 pôles de compétitivité sur les 67 projets labellisés. Cela représente peu de sélection, les onze autres restent en cours d'examen et deux ont fusionné. Les quinze pôles à rayonnement international ont tous reçu le feu vert du gouvernement.Ces pôles de compétitivité ont vocation à développer l'innovation industrielle par la mise en réseau, sur un territoire et dans un secteur précis, des centres de recherche et des organismes de formation, avec le soutien des chambres consulaires et des élus locaux. Les entreprises des secteurs d'activité sélectionnés vont bénéficier d'exonérations fiscales et sociales, ainsi que d'un environnement favorable à leur recherche et développement (R&D). Deux principes ont guidé le choix du gouvernement : la composition des équipes de direction et les limites géographiques des pôles. Dominique de Villepin et Christian Estrosi, ministre délégué à l'Aménagement du territoire, ont voulu conserver le caractère industriel et innovant des projets en plaçant un industriel ou un chercheur à leur tête. « Dans l'esprit de l'appel à projets, la gouvernance des pôles devait accorder une place prépondérante aux porteurs des projets labellisés en juillet 2005, tout en assurant la représentation des collectivités publiques souhaitant soutenir leur développement, précise Matignon. Aussi, la gouvernance des pôles a-t-elle été ouverte aux représentants des collectivités territoriales tout en ménageant une place prioritaire aux porteurs de projet, industriels, chercheurs et responsables des organismes de formation. Ceux-ci auront seuls la responsabilité du choix des thèmes et des projets de R&D des pôles labellisés». Divergences sur le zonage De même, le Premier ministre souhaitait que l'Etat reste aux commandes financières. Le gouvernement s'est donc refusé à ce qu'un élu local puisse présider les comités de coordination qui regroupent les financeurs (Etat, agences, banques et collectivités), préférant placer à ce poste un préfet. Autre point de divergence avec les collectivités locales : le zonage. « De nombreuses discussions techniques ont été conduites, dans un délai très court, entre la gouvernance des pôles, les préfets, les collectivités territoriales (au premier rang desquelles les régions) et les administrations centrales pour arrêter et justifier les zones dont la définition sera soumise au Conseil d'Etat », précise Matignon dans un communiqué. Toutefois le gouvernement pourrait étudier « si besoin est, les conditions dans lesquelles les entreprises qui se situeraient en dehors de ces zonages, mais qui participeraient directement aux projets de R&D portés par les pôles, pourraient bénéficier du régime des exonérations fiscales et sociales ». Dans une lettre au Premier ministre, le 7 septembre dernier, Alain Rousset, président socialiste de l'Association des régions de France (ARF), demandait à l'Etat de renoncer au zonage qui « risque de laisser à l'écart des entreprises partenaires potentielles ». Dans la majorité UMP, certains députés craignent l'effet d'aubaine, des entreprises déménageant pour bénéficier des aides publiques. En juillet dernier, le gouvernement avait évalué l'aide à 1,5 milliard d'euros sur trois ans. Les exonérations fiscales et de charges sociales sont estimées à 300 millions d'euros. Le montant des aides directes de l'Etat et des agences n'est pas précisé. « L'Agence pour l'innovation industrielle, dont la dotation s'élève à 2 milliards d'euros, identifiera, d'ici la fin de l'année 2005, parmi l'ensemble des projets de R&D portés prioritairement par les pôles, ceux susceptibles de bénéficier de ses soutiens et organisera, avec les gouvernances concernées, la préparation des dossiers de demandes financières», indique Matignon. L'agence nationale de la recherche et la Caisse des Dépôts et Consignations sont également mobilisées. Depuis plusieurs années, le gouvernement mène des politiques de « discrimination positive territoriale ». Les aides fiscales devant inciter les entreprises à s'installer dans les quartiers difficiles n'ont eu guère de retombées. En sera-t-il autrement pour ces pôles d'excellence ? Les stratégies d'implantation des entreprises internationales sont-elles influencées par ce type de mesures ? A Grenoble, la réduction d'effectifs prévue dans l'entreprise Hewlett-Packard a fragilisé le projet de pôle de compétitivité informatique (qui ne fait pas partie des 55 sélectionnés). La solution passera peut-être par le regroupement de PME et PMI. Développer une stratégie industrielle est certes nécessaire ; mais cette politique sera-t-elle suffisante pour créer des emplois ? Chantal MILLET |
Les Echos Judiciaires.fr |
Source : N° 5199 |
Date de parution : 04/11/2005 |
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