On a beau promettre un bel avenir aux contrats de partenariat en raison de la bouffée d’oxygène qu’ils peuvent apporter dans un contexte de raréfaction budgétaire, ils ne suscitent pas franchement l’enthousiasme dans le rang des collectivités locales. Jusqu’à présent, un seul projet a concrètement vu le jour selon le modèle de l’ordonnance du 17 juin 2004 : celui de la commune d’Auvers-sur-Oise qui s’est lancée dans cette aventure pour rénover son éclairage public. Cette constatation, renforcée par une récente intervention de Thierry Breton qui a demandé aux ministères de proposer au moins trois projets réalisables en partenariat public-privé (PPP) pour le 1er septembre prochain, se voit confirmée dans un récent rapport du commissariat du plan (1). Un groupe de travail nommé Racines, qui s’est saisi du sujet, confirme le peu d’engouement du secteur public local pour ce nouveau type de contrat.

Peur de s’engager dans une voie sans retours d’expérience

Selon les auteurs du rapport, la réserve des édiles vis-à-vis du PPP tient particulièrement au risque que le juge remette en cause la décision de recourir à ce modèle. On le sait, une étude préalable, prouvant le caractère urgent ou la complexité d’une opération, doit démontrer l’intérêt du PPP par rapport aux autres contrats publics existants. Mais cette étude préalable, auquel personne n’est encore aguerri, s’avère d’emblée difficile à réaliser. La logique d’évaluation juridique et économique préalable n’est pas une mince affaire. C’est une innovation dans l’action publique. De même, l’achat clé en main d’un package – construction, financement, prestations - n’est pas encore entré dans les mœurs. Aussi, comprend-on les craintes des élus de se voir sanctionnés par le magistrat. Et ce, d’autant plus qu’une annulation contentieuse présenterait un coût plus important dans le cas d’un PPP. A ces objections, il faut ajouter que les collectivités n’ont à leur portée, pour évaluer l’intérêt de ce nouveau contrat, que des dispositifs approchants : le bail emphytéotique hospitalier, le PFI, le bail emphytéotique administratif avec autorisation d’occupation temporaire assortie d’une location avec option d’achat (BEA avec AOT/LOA). La contribution de la mission d’appui permettra probablement de sécuriser les procédures et rassurer les acteurs locaux. Mais il est bien dommage que cet organisme, ainsi que le guide des bonnes pratiques sur les PPP, aient autant tardé à sortir (il a fallu attendre le 27 mai 2005)…

Manque de formation et de culture à l’évaluation

La conduite des négociations représente également aux yeux du commissariat du plan un frein au développement des contrats de partenariat. Nombre de collectivités, mais aussi de maîtres d’oeuvre, ont déjà exprimé leurs craintes d’être dessaisis des projets, au profit du ou des partenaires privés, et que la qualité architecturale des ouvrages en pâtisse. Pour les auteurs du rapport, cette remarque rejoint le problème plus général du manque de formations et de culture à l’évaluation des collectivités que l’Etat devra résoudre. Face à la nouveauté que représente le contrat de partenariat, la délégation de service public, maîtrisée et bien connue, éclipserait par ailleurs l’intérêt du modèle public-privé. Pire, il constituerait une solution moins opportune que la DSP pour des effets similaires car il reste complexe et juridiquement risqué. Enfin, en termes de comptabilité, une question essentielle continue de tarauder les élus locaux : celle de la comptabilisation des actifs. Ces derniers doivent-ils être enregistrés en tant qu’actifs publics ou dans le bilan du partenaire privé ? Les acteurs locaux n’ont entre leurs mains qu’un dispositif transitoire pour l’instant qui contribue à laisser planer une impréssion d’instabilité juridique.

Afin d’accélérer la cadence de lancements de projets en PPP, le commissariat du plan suggère vivement à l’Etat d’organiser des journées de formation consacrées à l’apprentissage des procédures de passation des contrats de partenariat : « L’Etat doit prendre en considération les difficultés inhérentes à la gestion du changement », est-il indiqué dans le rapport. L'organisme propose, en outre, d’améliorer le dispositif en vigueur car « s’il présente de nombreux avantages comparatifs, par rapport aux autres formes d’association du secteur public et privé, [il] reste perfectible ».

Sandrine Dyckmans © achatpublic.com, le 25/08/2005

(1) Partenariat public-privé et actions locales :

www.plan.gouv.fr/intranet/upload/publications/documents/CahiersPlan9V2.pdf