13 juin 2006

Les PPP : mythes et réalités

Le lundi 12 juin 2006

Source : cyberpress.ca
Les PPP : mythes et réalités

Pierre Lefebvre
L'auteur est président-directeur général de l'Agence des partenariats public-privé du Québec.


Nous sommes déjà au premier anniversaire de l'Agence des partenariats public-privé du Québec. J'ai cru utile de rappeler certains des mythes véhiculés au sujet des PPP au cours de la dernière année ainsi que la réalité qui, souvent, s'y oppose ou à tout le moins les met en perspective.

Mythe no 1 - Les PPP sont une privatisation déguisée

On qualifie de privatisation une vente ou une cession finale par l'État à l'entreprise privée des biens et services qui lui appartiennent. Dans ces cas, c'est l'entreprise privée qui dicte unilatéralement le type de services qu'elle rend, la qualité d'entretien des biens et la durée pendant laquelle elle fournira les services. Dans le cadre d'un PPP toutefois, l'État reste souvent le propriétaire de l'infrastructure pendant la durée de l'entente ou, au minimum, redevient propriétaire de l'actif en bon état à la fin de l'entente. C'est aussi le gouvernement qui, à travers l'entente, détermine le type de services à être rendu par l'entreprise privée, ainsi que leur qualité. Le rôle des employés de l'État dans le cadre d'un PPP est très loin de celui joué dans le cadre d'une privatisation. Les employés du secteur public s'assurent du respect par le partenaire privé des termes et conditions de l'entente qui sera rendue publique. L'État et ses employés continueront d'être responsables de la reddition de comptes.

Mythe no 2 - Les PPP coûtent plus cher à l'État que le mode conventionnel

Cette critique repose habituellement sur le fait que les coûts de financement du secteur privé sont plus élevés que ceux du secteur public. Ce dernier est présumé avoir une capacité illimitée d'augmenter les taxes pour payer ses obligations. Bien qu'il soit vrai que le coût d'emprunt du secteur privé est invariablement plus élevé que celui du secteur public, ceci ne constitue qu'une partie du calcul qui doit être fait. Insister pour limiter l'exercice d'évaluation de l'opportunité de recourir aux PPP à ce seul facteur, tient de l'aveuglement volontaire.

Cette opportunité de recourir au mode PPP doit donc s'évaluer en considérant tous les coûts et bénéfices de chacune des approches, incluant le partage de risques entre les partenaires sur la durée de vie du projet. Dans ce contexte, Partenariats public-privé Québec et les ministères utilisent une méthodologie rigoureuse pour évaluer les coûts et bénéfices de chacune des approches de réalisation.

Mythe no 3 - Les PPP entraînent des délais plus longs que le mode traditionnel

On fait référence généralement ici à deux phénomènes :

Premièrement, la discipline inhérente au mode PPP si elle est suivie, rend souvent plus difficile l'annonce rapide d'un projet. En effet, plusieurs étapes incluant le dossier d'affaires doivent être complétées avant qu'un projet en mode PPP aille de l'avant. Une telle annonce ne peut donc se faire rapidement et à la légère. Elle n'est possible qu'après une analyse rigoureuse. Il s'agit, en effet, de temps bien investi.
Le deuxième phénomène fait référence à ce moment important dans la vie d'un projet: la première pelletée de terre. Le mode de réalisation conventionnel se définit souvent par une série de contrats octroyés les uns à la suite des autres pour différentes parties du projet. Cette première pelletée de terre peut s'effectuer alors que le projet n'est pas entièrement défini. Le mode PPP quant à lui attribue le contrat pour l'entièreté du projet. En conséquence, il est vrai qu'il est possible très rapidement de créer de l'activité sur un chantier.

Plusieurs études et analyses démontrent cependant que, bien que le mode conventionnel permette de commencer une partie du projet plus rapidement, le mode PPP amène quant à lui une réalisation complète plus rapide de l'infrastructure.

Mythe no 4 - Les PPP entraînent une baisse de la qualité des services

Il est d'abord primordial de comprendre, tel que discuté brièvement ci-dessus dans le contexte du mythe de la privatisation, que le partenaire privé n'est pas celui qui détermine la qualité à offrir, ni la quantité. C'est le secteur public, le maître d'oeuvre initial, qui établit les exigences de résultat au niveau des services. C'est alors l'obligation du partenaire privé de respecter ces exigences à défaut de quoi il ne recevrait pas sa pleine rémunération. Ces exigences et leur rémunération font partie d'une entente de partenariat. Cette entente est rendue publique en accord avec la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels.

Mythe no 5- le Québec n'a pas une expérience suffisante des PPP pour réussir

En premier lieu, c'est là un mythe qui déçoit beaucoup. D'autres juridictions (Grande-Bretagne, France...) ont eu moins peur du changement et du progrès; et elles ont réussi. Le Québec peut s'inspirer de l'expérience de ces juridictions afin d'éviter les erreurs. En second lieu, plusieurs firmes-conseils et compagnies québécoises comptent parmi leurs effectifs des experts en PPP et dans les domaines connexes. N'oublions pas que certaines firmes et compagnies québécoises ont participé à des PPP à l'extérieur et n'ont pas attendu que le Québec s'avance dans cette voie. Si ce mythe défaitiste et réactionnaire avait été présent dans le Québec des années 70, des projets comme la première phase de la Baie James n'auraient jamais vu le jour et plusieurs firmes québécoises n'exporteraient pas aujourd'hui cette expertise.

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