11 juin 2007

Les fonds publics à la rescousse de Galileo

par Yves Clarisse, Source : Reuters

LUXEMBOURG (Reuters) - L'Union européenne s'engage à financer sur fonds publics l'infrastructure de Galileo, l'ambitieux système européen de positionnement par satellite menacé par la défaillance du secteur privé.

Mais les ministres des Transports des Vingt-Sept, qui se sont réunis à Luxembourg pour sauver ce projet-phare de l'UE, restent fortement divisés sur les modalités précises du financement et la question a été reportée à l'automne prochain.

Le secrétaire d'Etat français aux Transports, Dominique Bussereau, n'a pas caché que l'heure était grave après que les industriels eurent refusé de prendre le moindre risque financier malgré l'engagement qu'ils avaient pris il y a deux ans.

"Galileo, cela aurait très bien pu se terminer aujourd'hui", a-t-il déclaré. "C'aurait été un signal terrible pour l'Europe."

Certains pays, comme le Royaume-Uni, ne sont pas convaincus qu'il s'agit réellement d'un programme stratégique dans le mesure où son concurrent, le GPS (Global Positioning System) américain, est d'ores et déjà disponible gratuitement.

Mais la plupart des pays européens sont d'un avis contraire.

"Il faut que nous trouvions notre place par rapport à l'Amérique et à l'Asie", a estimé lors d'une conférence de presse le ministre allemand des Transports, Wolfgang Tiefensee, dont le pays préside actuellement l'Union européenne.


GALILEO SUR LE PAS DE TIR

Dès lors, les Vingt-Sept se sont rassemblés pour décider de prendre le relais, mettant fin, du moins pour la construction et le lancement des 30 satellites nécessaires, à un partenariat public-privé qui a échoué, comme souvent dans des projets risqués qui requièrent au début l'intervention de l'Etat.

"Nous pouvons remettre le projet Galileo sur le pas de tir pour le rendre opérationnel en 2012", s'est réjoui Jacques Barrot, le commissaire européen aux Transports.

Les Vingt-Sept ont donc décidé que l'argent public financerait l'infrastructure satellitaire pour un coût de 3,4 milliards d'euros, soit 2,4 milliards supplémentaires par rapport au milliard d'euros déjà injecté, sur un coût total, exploitation comprise, de 10 milliards d'euros.

Barrot a relativisé l'ampleur de ces sommes en expliquant que cela représentait 400 millions d'euros sur six ans, soit le coût de la construction de 400 kilomètres d'autoroute par an.

Mais les détails devront être réglés à l'automne et Tiefensee n'a pas exclu un désaccord qui fasse échouer le projet, dans le mesure où deux camps s'affrontent.

La Commission, le Parlement de Strasbourg et la plupart des Etats membres sont favorables à un financement par le budget européen des 2,4 milliards d'euros nécessaires.

Ce montant est disponible, puisque chaque année de trois à 10 milliards d'euros représentant la différence entre les crédits d'engagement - les sommes prévues pour les projets - et les crédits de paiement - les montants réellement payés - sont ristournés aux Etats membres à l'issue de l'exercice budgétaire.


MÉFIANCE FRANCO-ALLEMANDE

Mais l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas préféreraient un système par lequel chaque pays fournirait une contribution à l'Agence spatiale européenne.

Ces pays veulent s'assurer ainsi des retombées plus importantes dans le domaine industriel - au sein de l'agence, le "retour" est égal à ce qui est mis dans le pot commun - et limiter l'intrusion de la Commission européenne dans la gestion.

Pour certains responsables, il s'agit d'une conséquence de la méfiance qui s'est installée entre la France et l'Allemagne dans le cadre de la restructuration d'Airbus, filiale d'EADS (EAD), chacun tirant la couverture à soi.

Aucun pays n'a voulu totalement exclure une option - Tiefensee a même parlé d'y associer en partie le secteur privé - et, selon des sources de la Commission, c'est un mélange des deux possibilités qui devrait finalement s'imposer.

Beaucoup plus précis que le GPS, Galileo devrait avoir de multiples applications dans l'agriculture, les transports, l'environnement, la pêche, la surveillance des infrastructures.

Le consortium privé choisi est composé de grands groupes industriels européens: le géant de l'aérospatiale EADS (EAD), les français Thales (HO) et Alcatel-Lucent (ALU), le britannique Inmarsat, l'italien Finmeccanica, les espagnols AENA et Hispasat et le duo allemand Deutsche Telekom-Centre aérospatial allemand.

Même s'il renonce au financement de l'infrastructure, il lui reviendra d'exploiter Galileo lorsqu'il sera opérationnel.

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