Le premier contrat de partenariat français, conclu pour la construction et l'exploitation d'un collège de Villemandeur (Loiret), a été annulé par le Tribunal administratif d'Orléans. Le contrat de partenariat avait été remporté en juillet 2006 par Sogea Nord-Ouest, filiale de Vinci Construction, associée à Auxifip (filiale du Crédit Agricole).
Le Syndicat national du second oeuvre (SNSO) contestait principalement le motif d'urgence qui avait conduit le conseil général à l'usage du CP. Le tribunal suit les conclusions de Ghislaine Borot, commissaire du gouvernement, en estimant que les conditions d'urgence telles qu'interprétées strictement par le Conseil constitutionnel n'étaient pas satisfaites en l'espèce.
L'urgence est bien connue des juristes spécialisés en droit public. En contentieux, la notion est un véritable chausse-trappes. Il n'en existe pas de définition précise mais, paradoxe, la démonstration de l'urgence est requise dans certaines procédures. L'urgence en matière de contrat PPP ressemble à cette approche, l'urgence comme élément "indispensable mais insaisissable".
La notion d'urgence est présente dans le Code des Marchés Publics. Mais elle se rencontre dans un contexte largement différent du contrat PPP. En droit des marchés publics, l'urgence permet de justifier le recours à des procédures dérogatoires. Deux formes d'urgences existent dans le Code : l'urgence simple qui permet de raccourcir les délais de consultation (à 3 jours, réjouissez-vous, .sic) ; l'urgence impérieuse qui permet à la personne publique de recourir à la passation d'une procédure négociée. Dans tous les cas, l'urgence ne peut pas résulter de faits imputables à la personne publique. L'urgence en marchés publics implique l'existence de circonstances objectives. En ce sens, la définition de l'urgence faite par les directives Marchés Publics rejoint cette conception.
L'urgence dans le contrat PPP se distingue de cette conception dérogatoire. En effet, pour recourir au PPP, il faut démontrer la complexité ou/et l'urgence. En PPP, l'urgence constitue un des éléments de fond du recours à la procédure de PPP. L'urgence démontrée conduira à l'application d'une procédure de droit commun (l'appel d'offres) au contraire de ce qui se pratique en marchés publics ( l'urgence conduisant à des procédures dérogatoires telles que le marché négocié ).
Mais comment définir l'urgence ?
Le Conseil d'Etat en a donné une approche concrète dans une décision du 29 octobre 2004 concernant le recours au contrat PPP. L'urgence est ce qui "résulte objectivement, dans un secteur ou une zone géographique déterminés, de la nécessité de rattraper un retard particulièrement grave affectant la réalisation d'équipements collectifs". En clair, et comme le relève la maPPP, l'urgence ne semble pas exclure la carence de la personne publique. La sécurité défaillante, le vieilissement préjudiciable des ouvrages, la mise en conformité délicate sont autant d'éléments qui pourrait justifier l'urgence de recourir à un PPP. Le point clef résidera dans la démonstration de l'urgence rencontrée et non dans une simple affirmation "qu'il y a urgence".
Prenons le cas du PPP (contesté) du collège de Villemandeur. Le Syndicat National du Second Oeuvre conteste la décision prise par le Conseil Général du Loiret d'attribuer la construction du collège sous forme d'un PPP. Selon le communiqué du SNSO, la condition d'urgence n'aurait pas été remplie. Extrait :
"En l'espèce, le département du Loiret a choisi l'appel d'offres restreint au motif de l'urgence. Cependant, le guide des bonnes pratiques du contrat de partenariat rédigé par la mission d'appui du ministère de l'économie et des finances, explique avec justesse que " l'urgence évoquée par le Conseil constitutionnel n'est pas différente de celle traditionnellement admise par les juridictions administratives. Il s'agit d'une urgence objective qui ne doit pas résulter à priori du fait de l'administration ".
Sans débattre de la position de principe du SNSO, on peut s'interroger sur la notion d'urgence développée à l'appui de la requêté introduite par le syndicat. A mon sens, l'urgence du contrat PPP n'est pas celle retenue et modelée par la juridiction administrative dans le cadre de la définition des limites d'un référé suspension ou d'un référé conservatoire. Le contrat PPP fait de la condition d'urgence une urgence objective, et qui, encore une fois selon la Mappp, n'exclue pas la carence de la personne publique. Retenir une conception de l'urgence aussi restrictive qu'en matière de contentieux reviendrait à vider de sens l'ordonnance du 17 juin 2004.
Revenons à Villemandeur. Comme bon nombre de communes françaises, Villemandeur est confronté à une carence d'équipements scolaires pour ses 5600 habitants. En 2003, le Conseil Général a décidé de construire un nouveau collège à Villemandeur et de réduire les capacités d'accueil du collège d'Amilly qui faisait lui même l'objet d'une lourde restructuration. Le collège d'Amilly (en restructuration...) devait donc accueillir les élèves qui seraient ultérieurement scolariés dans le futur collège de Villemandeur. Ce nouveau collège devait être terminé pour la rentrée scolaire 2004 mais....
Les travaux ont pris beaucoup de retard. La restructuration du collège d'Amilly rend le collège disponible pour la rentrée 2005. Quant à celui de Villemandeur, les problèmes se succèdent. Tout d'abord, des problèmes de foncier. La mairie de Villemandeur devait proposer des terrains au constructeur mais il apparait que les terrains convoités appartiennent à des propriétaires privés : la négociation prend du temps. Ensuite, l'appel d'offres lancé sur les etimations du maître d'oeuvre donnent des résultats dépassant de 30% à 40% le montant estimé par la Moe. La mairie de Villemandeur relance l'appel d'offres sur la base d'estimations nouvelles mais le résultat n'est pas probant. Deuxième coup manqué. En conséquence, la résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre est prononcée....
Pendant ce temps, les enfants de la municipalité de Villemandeur "surchargent" le collège d'Amilly. Et... pour faire fonctionner l'ensemble, le Conseil Général est contraint de faire des travaux pour accueillir temporairement cet afflux de collégiens.
Le projet de construction du collège de Villemandeur est repris à zéro. Le Conseil Général se tourne vers le PPP après évaluation préalable et dans le contexte de "l'urgence" résultant des éléments exposés sur ces quelques lignes.
Au vu de ces éléments factuels, doit on considérer que le Conseil Général se trouvait face à un projet objectivement urgent ? A votre avis...?
Le Tribunal Administratif d'Orléans a lancé un véritable "pavé dans la mare", en pleine réforme du CP...
Source : http://moniblogs.lemoniteur-expert.com
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1 commentaire:
Le PPP du Château de Versailles imposé par Christine Albanel implose 15 mois après !!
Le 28 mai 2008, la direction de l’Etablissement Public du Château de Versailles a décidé de mettre un terme au PPP signé il y a un peu plus d’un an par Christine Albanel, alors Présidente de l’établissement, avec la société Unilog (aujourd’hui Logica).
article sur http://www.cgt-culture.fr/publication/article.php3?id_article=705
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