08 septembre 2008

Limites constitutionnelles à l'extension du recours aux Contrats de partenariat

La dernière mouture de la loi relative aux contrats de partenariat a été publiée le 28 juillet dernier après le toilettage imposé par le Conseil constitutionnel de la première version de la loi qui avait été adoptée sans modification par le Sénat, le 9 juillet 2008, en deuxième lecture.

Le Conseil constitutionnel avait été saisi le 15 juillet par soixante députés (texte de la saisine) et soixante sénateurs (texte de la saisine) de la loi relative aux contrats de partenariat. Il s’est prononcé le 24 juillet 2008 dans sa décision n° 2008-567 DC.

La décision a déclaré contraires à la Constitution plusieurs parties des articles 2, 18 et 19. Il a, de plus, soulevé d’office et déclaré contraires à la Constitution deux alinéas de l’article 16.

Le Ministre des finances retient pour l'essentiel la validation des deux apports majeurs : "la création d'un troisième critère de recours aux contrats de partenariat" et "le principe de l'harmonisation du régime en matière fiscale et assurantielle entre tous les contrats de la commande publique".

En revanche, pour le député PS Jean-Jacques Urvoas qui avait largement suivi le projet sur son blog, la décision des Sages du Palais Royal "rappelle au gouvernement qu'on ne peut pas au nom d'une prétendue urgence se soustraire aux règles constitutionnelles".

Confirmant sa jurisprudence de juin 2003 et décembre 2004, le Conseil a jugé conforme à la Constitution la création, aux côtés des critères déjà admis de l'urgence et de la complexité, d'une troisième voie de recours ouverte dans tous les cas où le bilan entre les avantages et les inconvénients du contrat de partenariat est "favorable".

Mais il censure un article qui présumait urgents une série de projets, dans des domaines très divers (des infrastructures de transport "s'inscrivant dans un projet de développement durable" aux travaux permettant d'améliorer l'efficacité énergétique des bâtiments publics en passant par les collèges et les lycées).

Les juges constitutionnels ont conclu que ces dispositions limitaient la portée de l'évaluation préalable et empêchaient le juge d'exercer son contrôle sur le caractère d'urgence.

En 2002 le Conseil constitutionnel avait déjà dû examiner les premières lois « inventant » une espèce de contrat de partenariat pour les opérations immobilières destinées à répondre aux besoins de la police nationale, de la gendarmerie et de la justice (déc. n° 2002-460 du 22 août 2002 et n° 2002-461 du 29 août 2002). Il a décidé à cette époque que ces lois, qui dérogeaient aux règles de droit commun de la commande publique en instituant des contrats globaux, ne portaient pas atteinte, par elles-mêmes, au principe d’égalité devant la commande publique.

L’année suivante, le Conseil constitutionnel a dû examiner à l’occasion d’une loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, les dispositions instituant formellement des « contrats de partenariat » portant sur « la conception, la réalisation, la transformation, l’exploitation et le financement d’équipements publics, ou la gestion et le financement de services, ou une combinaison des ces différentes missions ». Dans sa décision (n° 2003-473 du 26 juin 2003), il a précisé « que, toutefois, la généralisation de telles dérogations au droit commun de la commande publique ou de la domanialité publique serait susceptible de priver de garanties légales les exigences constitutionnelles inhérentes à l’égalité devant la commande publique, à la protection des propriétés publiques et au bon usage des deniers publics ».

C’est pourquoi le Conseil constitutionnel a imposé dès 2003 que les domaines d’application du contrat de partenariat soient réservés « à des situations répondant à des motifs d’intérêt général tels que l’urgence qui s’attache, en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable, ou bien la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d’un équipement ou d’un service déterminé ».

L’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat, qui constitue le cadre juridique général des contrats de partenariat et qui faisait ici l’objet d’une loi modificative, ayant respecté ces principes, avait d’ailleurs été validée sur le fondement de la déc. n° 2003-473 du 26 juin 2003, par l’arrêt du Conseil d’Etat n° 269814, du 29 octobre 2004, Sueur et autres. Par ailleurs, la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit a ratifié l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat, et elle a été, précisément sur ce point, reconnue conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel (déc. n° 2004-506 DC, du 2 décembre 2004).

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