14 janvier 2005

Grande Bretagne : Cadre juridique des PPP

Le cadre juridique des PPP
en Grande-Bretagne -
La législation habilitante et la standardisation

Stephen Matthew, associé, chef du département des projets —
Eversheds LLP

Quelles furent les fondations pour un développement durable du marché des PPP en Grande Bretagne ?

Cet article aborde deux éléments essentiels : le cadre juridique stable et l'élaboration d'accords commerciaux standards.

L'ENVIRONNEMENT JURIDIQUE

En l'absence d'un cadre juridique stable et d'une certitude raisonnable quant à la position commerciale de chacune des parties, il ne peut y avoir de développement durable des transactions de PPP. Il est essentiel de reconnaître que ces transactions ont tendance, de par leur nature, à être des transactions complexes et sur le long terme, mettant en présence une multitude de parties. En clair, les banques ne financeront pas les projets de PPP à moins que soit présent un élément de certitude quant à l'environnement juridique.

L'État, y compris les collectivités locales, doit pouvoir remplir ses obligations et assumer ses responsabilités. En Grande-Bretagne, cela constitue une considération importante compte tenu de la nature de notre système de gouvernement qui repose sur la délégation. Les collectivités locales de la Grande-Bretagne sont des organismes autonomes ayant le pouvoir de contracter en leur propre nom. Dans le cadre de projets qui comportent, par exemple, des écoles ou des hôpitaux, le secteur privé conclura donc un contrat avec la collectivité locale et non avec le gouvernement central. Le pouvoir attribué aux collectivités locales, y compris la capacité de lever des fonds, est régi par la loi. C'est pourquoi le secteur privé, et en particulier les banques, voudront comprendre le cadre juridique délimitant les obligations et les responsabilités d'une collectivité locale.

L'État ne peut résilier une transaction tout simplement parce que celle-ci ne lui est pas favorable. Il y a quelques années, certaines collectivités locales de Grande-Bretagne ont conclu plusieurs arrangements financiers qui, par la suite, leur imposèrent d'importantes pertes financières. Dans le cadre de nombreux et importants recours judiciaires, ces collectivités locales ont soutenu que les engagements contractuels qu'ils avaient conclus se situaient au-delà de leur pouvoir statutaire et qu'en conséquence, n'étaient pas exécutoires. Le fait qu'un nombre de collectivités locales eurent la faculté de résilier les transactions qu'elles avaient conclues fut un facteur déterminant pour l'élaboration de quelques-unes des législations subséquentes qui encadrent désormais le programme des PPP en Grande-Bretagne.

La législation peut s'avérer nécessaire pour supporter les transactions PPP dans chaque secteur : différentes lois peuvent être nécessaires dans les cas de transactions PPP dans le secteur des écoles, des hôpitaux, du transport, du traitement des déchets, etc. Dans cet article, nous analysons 3 exemples particuliers qui illustrent comment les lois furent ajustées en Grande-Bretagne afin d'appuyer les transactions PPP :

Le PPP du métro de Londres
Le métro de Londres est le système de rail souterrain qui transporte chaque jour des milliers de personnes dans la périphérie londonienne. L'objectif de ce projet était de moderniser le métro et de promouvoir l'investissement du secteur privé, en partenariat, dans les opérations du métro. Selon la structure de la transaction, le contrôle des opérations demeure au sein du secteur public. Le secteur privé a toutefois la responsabilité de réhabiliter et d'assurer la maintenance des infrastructures au terme de contrats d'une durée de 30 ans.

Afin de soutenir ce projet, une loi du parlement fut requise : la « Greater London Authority Act of 1999 » qui a mis en place le cadre juridique de la transaction PPP et a posé les paramètres au sein desquels la transaction devait être structurée. Certaines dispositions de cette loi visent à protéger ce qui est considéré comme étant un service public essentiel. Simplement, la loi vise à empêcher le secteur privé d'exercer ses sûretés sur les actifs d'une manière qui pourrait faire cesser les opérations du métro de Londres. La loi permet la conclusion de certaines ententes et régule les conséquences que pourrait avoir l'insolvabilité de l'une des compagnies PPP. Enfin, la loi crée un organisme indépendant ayant juridiction en matière de différends entre le secteur public et le secteur privé et pouvant examiner les révisions tarifaires qui surviennent périodiquement.

Les écoles des collectivités locales
L'objectif du programme PPP dans le secteur scolaire fut la reconstruction d'écoles en faisant appel au financement et à l'expertise du secteur privé. La plupart de ces projets visent des transactions d'une durée de 30 ans transférant au secteur privé les risques de conception, construction, financement et exploitation. Les enseignants demeurent au sein du secteur public. Ces transactions sont généralement conclues avec des organismes scolaires locaux et non avec le gouvernement central.

Afin d'appuyer les écoles, une législation sur les projets fut nécessaire pour conforter les banques, en particulier. La Loi « Local Government Contracts Act 1997 » fut votée notamment afin de remplir cet objectif. Cette loi empêche les autorités locales de résilier une transaction PPP sans être obligées de verser une compensation. Cette loi fut, à plusieurs titres, la réponse directe aux situations où les autorités locales avaient été à même d'argumenter avec succès que les transactions qu'elles avaient conclues étaient illégales et, en conséquence, ne pouvaient avoir d'effets juridiques. La loi de 1997 précise aussi que les autorités locales peuvent conclure des transactions de PPP et va aussi loin que prévoir que l'autorité locale puisse émettre un certificat aux parties du secteur privé, certificat décrivant les pouvoirs statutaires autorisant la signature du contrat. Ces mesures empêchent donc les autorités locales de soutenir par la suite que la transaction était illégale.

Les hôpitaux locaux
L'objectif du programme des PPP dans le secteur de la santé est de construire de nouveaux hôpitaux et d'autres infrastructures reliées à la santé. Ici encore, ce programme est mis en œuvre en faisant appel au financement et à l'expertise du secteur privé. La structure usuelle des transactions de PPP dans le secteur de la santé est un contrat de 30 ans transférant au secteur privé les risques de conception, construction, financement et exploitation. Cependant, les employés du secteur public ne sont généralement pas transférés au secteur privé et les soins cliniques demeurent gratuits pour les patients.

Afin d'appuyer les hôpitaux, une législation sur les projets fut nécessaire. En particulier, la Loi « National Health Service Residual Liabilities Act 1996 ». Au terme de cette loi, il est de la responsabilité du gouvernement de prendre en charge les obligations d'un hôpital local en forme de PPP si, pour quelque raison que ce soit, cet hôpital se trouve dans l'incapacité de rencontrer ses obligations financières.

Tous ces exemples font ressortir la diversité des transactions de PPP et le besoin de législations diverses pour chacun des secteurs. Il n'y a pas de législation unique qui appuie les partenariats public-privé dans tous les secteurs.

STANDARDISATION

La standardisation des dispositions contractuelles permet d'épargner temps et argent et stimule le financement bancaire. Elle assiste aussi toutes les parties, que ce soit du secteur public ou privé, dans l'évaluation des transactions sur une base uniforme. En Grande-Bretagne, le développement d'une forme standard de contrats a été fragmenté. En effet, différentes formes de contrats standards furent développées dans chaque secteur. Toutefois, cet exercice fut coordonné par le gouvernement central grâce à une variété d'agences y compris le Conseil du Trésor. Au cours de la dernière année, on constate qu'il y a eu beaucoup plus d'efforts d'harmonisation pour les différents contrats qui ont été utilisés. Ces efforts d'harmonisation ont encouragé le marché et considérablement réduit les coûts rattachés à la négociation des transactions.

Il existe presque un contrat standard pour les transactions PPP mais qui comporte des variations pour chaque secteur. Les mêmes promoteurs, banques ou avocats étant amenés à structurer des transactions dans différents secteurs, l'harmonisation est importante. Il est peu probable qu'il y aura à l'avenir un seul format de contrat de PPP mais la Grande-Bretagne n'en est pas éloignée. Les directives et les documents standards sont constamment améliorés. La notion de standardisation ne s'applique toutefois pas qu'aux documents juridiques. Une standardisation des spécifications a aussi été développée, mais encore pour le suivi de performance, les modalités de paiement et même la conception des nouvelles écoles.

CONCLUSION

D'abord le PPP requiert un cadre juridique. Sans ce cadre juridique, le marché ne pourra se développer. Le cadre juridique peut se développer de manière graduelle et s'adapter aux caractéristiques particulières de chaque secteur. Plus important, le cadre juridique doit aborder la question de la solvabilité financière du secteur public. Cela est essentiel pour encourager les banques à participer au financement des projets.

La standardisation a épargné du temps et de l'argent. Elle permet aussi de réaliser des transactions de façon uniforme, rendant ainsi utile l'exercice de comparaison. Enfin, la standardisation requiert de la coordination et doit être améliorée constamment.

Ces deux aspects ont permis de tisser le marché des PPP en Grande-Bretagne, contribuant ainsi à promouvoir les transactions et encourager les promoteurs et financiers.

Eversheds a agi dans le cadre de plus de deux cents transactions PFI-PPP qui ont été conclues, représentant au-delà de 12 milliards de livres. Le cabinet agit comme conseillers juridiques dans plus de 90 dossiers dans les secteurs de l'éducation, de la santé, de l'habitation, des services d'urgence, du traitement des déchets, du loisir, de la défense et des transports. n

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