13 avril 2006

Les PPP sont trop coûteux, selon une étude anglaise

FINANCEMENT DES HÔPITAUX

Les PPP sont trop coûteux, selon une étude anglaise

André Noël

Source : La Presse

Alors que le gouvernement québécois envisage de construire les deux grands hôpitaux universitaires de Montréal en mode de partenariat public privé (PPP), une étude financée par l'Association des comptables agréés de Grande-Bretagne remet cette formule en question, en soulignant qu'elle est moins avantageuse que le financement public.

«Notre recherche montre, à partir de l'expérience vécue jusqu'à maintenant, que le financement privé (des hôpitaux) s'avère très coûteux», note l'étude, parue en mars, et signée par trois professeurs de comptabilité à la Manchester Business School.

Les auteurs ont étudié le cas de 13 hôpitaux construits selon la formule du Private Finance Initiative (PFI), l'équivalent des PPP. Selon ce mode de financement, lancé par le gouvernement britannique au cours des années 90, des consortiums privés empruntent eux-mêmes les fonds pour construire des hôpitaux. Les agences publiques de santé, appelées trusts, les louent ensuite pour des périodes variant de 25 à 40 ans.



Au début de cette année, le Queen Elizabeth Hospital Trust à Woolrich, en banlieue est de Londres, s'est déclaré techniquement en faillite. Or, cet hôpital a été le premier à être construit en mode PFI (ou PPP). «Le coût du financement privé, en incluant le coût du transfert de risque, et ses impacts sur les trusts (les agences publiques de santé) signifient que l'échec du premier hôpital à être construit en PFI (ou PPP) ne sera fort probablement pas un cas isolé», affirme l'étude.

Sur les 13 cas d'hôpitaux construits en PPP et analysés par les professeurs, six étaient en déficit. Quatre de ces six hôpitaux avaient des coûts plus élevés que ce qui avait été prévu lors de la signature des contrats avec les consortiums privés. Jean Shaoul, auteure principale de l'étude, affirme que les coûts en PPP sont de 25 % à 50 % plus élevés que des constructions financées par des fonds publics.

«Il y a toutes sortes de raisons pour cela, a dit Mme Shaoul, jointe par téléphone hier. Le gouvernement peut emprunter à un taux inférieur à 5 %, alors que les consortiums privés empruntent à des taux deux fois plus élevés, de presque 10 %. Il faut aussi ajouter la marge de profit. Enfin, la conclusion des contrats est tellement complexe et longue qu'elle coûte elle-même très chère, entre autres en frais de transaction.»

Par ailleurs, une des principales compagnies spécialisées en PPP, la firme de services professionnels Deloitte, vient de publier un rapport affirmant que cette formule se révèle mauvaise pour plusieurs projets publics, dont les hôpitaux. Mike Kerr, directeur des services financiers spécialisés chez Deloitte, a dit au Financial Times que les PFI ou les formules semblables «fonctionnent bien dans plusieurs circonstances», par exemple pour la construction d'écoles, de petits centres de santé ou de routes, dont le design n'est pas appelé à changer beaucoup sur des longues périodes.

«Mais il y a toute une gamme de situations où ils (les PFI) ne sont pas valables, a ajouté M. Kerr. Les PFI peuvent être une formule trop rigide, compte tenu de la longueur des contrats et de la difficulté d'effectuer des changements.» Lorsqu'il est impossible de savoir quels changements devront être effectués, et c'est le cas des grands hôpitaux, les PFI ne fonctionnent pas bien, souligne M. Kerr.

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