28 octobre 2005

France : Contrat de partenariat permet de déclencher un cercle vertueux pour la gestion du patrimoine public

Alain Chinardet

Filiale de Bouygues Construction, ETDE, spécialiste de la gestion des réseaux (eau, énergie, éclairage public) et de la maintenance multi-service, a remporté à Auvers-sur-Oise le premier contrat de partenariat lancé par une commune. Directeur commercial d’ETDE, Alain Chinardet apporte l’éclairage d’une entreprise sur ce nouveau dispositif. Il se dit convaincu des atouts du PPP, plus souple et plus réactif que les marchés classiques, et surtout capable de déclencher un « cercle vertueux » dans le domaine du patrimoine public, en privilégiant l’investissement plutôt que les dépenses de fonctionnement.



Avec ses chiffres impressionnants - 9500 collaborateurs, un milliard d’euros de chiffre d’affaires prévu en 2005 - on peut se demander pourquoi ETDE, filiale électricité et maintenance de Bouygues Construction, a répondu au « petit » contrat de partenariat (2,3 millions d’euros sur six ans) proposé par Auvers-sur-Oise (6900 habitants, Val d’Oise) dans le but de rénover son réseau d’éclairage public avec à la clef l’ingénierie financière, l’ingénierie lumière, la fourniture et la gestion de l’énergie, la rénovation, la modernisation, la maintenance et le gros entretien de l’éclairage public municipal (1 338 points lumineux) ainsi que la signalisation lumineuse tricolore. « C’est notre cœur de métier. Et chez nous, il n’y a pas de petites affaires, ni de petits clients », répond d’emblée Alain Chinardet, directeur commercial. Pas question donc pour l’entreprise leader du marché de rater le 1er contrat de partenariat modèle ordonnance du 17 juin 2004. ETDE a même mis « un point d’honneur à remporter le contrat, au sein d'un groupement avec l'entreprise EL-ALE ». « C’est le premier, et loin d’être le dernier », promet Alain Chinardet, pour qui le dossier de la modeste commune valdoisienne est une « référence ». Le cadre d’ETDE ne cache pas qu’il est un fervent partisan de la formule PPP, « riche de promesses pour les élus locaux. » D’abord parce qu’elle remet dans la course le paiement différé, outil interdit par les marchés publics classiques. Certes, le législateur n’a pas jugé utile de l’écrire noir sur blanc, mais il s’agit quand même d’un argument porteur. « On peut réaliser des prestations dans un délai court en réalisant des investissements avec un loyer. C’est un facteur non négligeable surtout dans le domaine de la lumière ». Car aux dires d’Alain Chinardet, faute d'investissement le parc français est « de plus en obsolète».

Investir pour réduire les frais de fonctionnement

Le contrat de partenariat donne donc un relief tout particulier à la problématique de l’entretien de ce patrimoine public. « Jusqu’ici, on appelait son fournisseur pour la maintenance corrective, lorsque le matériel tombait en panne », rappelle-t-il en soulignant la hausse des frais de fonctionnement. C’est pourquoi il estime que le contrat de partenariat peut déclencher un « cercle vertueux » : bien investir au démarrage, afin de limiter les coûts par exemple dans le domaine énergétique, diminuer les charges de fonctionnement, dégager de nouvelles marges de manœuvre afin de pouvoir à nouveau investir. Le rendement économique s’avère un sérieux atout. Pour le directeur commercial d’ETDE, le PPP permet aux personnes publiques d’engranger les dividendes d’un investissement décidé suffisamment tôt : « dans le cas d’Auvers-sur-Oise, le retour sur investissement est effectif dès la fin de la première année ». L’autre avantage du nouveau contrat est sa capacité à s’adapter. Dans le domaine de l’éclairage public, les marchés portent en moyenne sur 12 ans. « Autant dire que la structure urbaine ne reste pas figé durant ce laps de temps. Or le système du marché public, même avec les avenants, ne permet pas de coller à l’évolution de la ville. Alors que le contrat de partenariat permet de modifier, de supprimer, d’étendre ce qui a été prévu à l’origine. Cette souplesse de gestion, c’est vraiment un plus », assure-t-il. Alain Chinardet insiste sur le partage des risques, différence fondamentale par rapport au système traditionnel. Alors que dans le cadre d’un marché, l’imprévisible ne peut être pris en charge par le titulaire, le PPP permet, à l’instar du PFI britannique, de transférer certains risques du donneur d’ordres à l’entreprise attributaire. Il donne, pour la lumière, l’exemple des accidents ou du vandalisme difficilement quantifiables, sauf en référence au passé. « L’entreprise, dans le PPP, devra prendre ses dispositions en fonction de son expérience, et prévoir un budget ».

Un dialogue compétitif encore trop souvent réduit à un grand oral

Et pour les entreprises ? « La démarche PPP a un intérêt évident, c’est l’accélération des activités par rapport au cycle normal des marchés publics », confie Alain Chinardet. On pourra rétorquer que le PPP et ses arcanes juridico-financières impliquent un long apprentissage. Contrairement à d’autres firmes, ETDE ne part pas dans l’inconnu puisqu’elle bénéficie de la capitalisation d’expériences menée par le groupe Bouygues lors des PFI, les PPP britanniques. « Le parcours du combattant n’est pas triste, qu’il s’agisse d’un marché ou d’un PPP, quand on n’a jamais répondu à un appel d’offres sur performances ou à un dialogue compétitif », concède Alain Chinardet qui apprécie l’introduction de cette procédure. « C’est une véritable chance de recueillir de l’expertise, des idées novatrices, et d’aller plus loin dans la solution à apporter ». Toutefois tempère-t-il, on est encore loin d’un vrai échange avec le donneur d’ordre : « aujourd’hui, dans les collectivités, on a toujours tendance à nous faire passer une audition sur le mode de l’AOP, une sorte de grand oral ». Zone d’ombre du PPP, le risque d’éviction des PME avait provoqué en 2004 une levée de boucliers. Le directeur du département collectivités locales d’ETDE évacue la controverse : « je conseille aux élus locaux de mettre la place réservée aux PME comme critère », et il rappelle qu’à l’occasion de la compétition d’Auvers-sur-Oise sa société s’est alliée pour la circonstance avec EL-ALE, entreprise de proximité qui avait pour atout de bien connaître la commune.

Jean-Marc Binot © achatpublic.com, 27/10/2005

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